Ven. 30 Sep 2022, 01:00
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La recherche sur les coronavirus se poursuit. On ne connaîtra peut-être jamais l'origine précise du Sars-Cov2, le virus à l'origine de la pandémie de Covid-19, mais ce qui est sûr, c'est que tout part d'une chauve-souris. Alors, pour anticiper les prochaines épidémies, des chercheurs étudient activement ces animaux.
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Et pour cela, pas besoin d'aller jusqu'en Chine. Meriadeg Le Gouil nous emmène à Pontchateau, près de Saint-Nazaire, en Loire-Atlantique. A la tombée de la nuit, quelques minutes de marche, d'escalade dans les ronces à la lumière des lampes frontales avec ce virologue de l'Université de Caen, affilié à l'Inserm, et on pénètre dans une immense grotte. "C'est une ancienne galerie qui date de la guerre dans laquelle les chauves-souris nichent. On va avoir trois ou quatre espèces qui vont se rencontrer ici", explique le chercheur.
Des scientifiques tout-terrain
Vous l'avez compris, on est loin, très loin de l'image du scientifique à la blouse blanche dans un labo bien propre. Ses bottes de pluie et sa lampe frontale, Meriadeg Le Gouil les a traînées pendant des années dans les grottes d'Asie et d'Afrique pour étudier les chauve-souris, mais pas uniquement. "Je me suis rendu compte qu'il y avait aussi beaucoup de coronavirus chez nos chauves-souris. On a 36 espèces différentes en France, détaille le scientifique. On a aussi des rhinolophes - celles dont on parle beaucoup en ce moment pour le Sars-Cov2."
"Pour étudier les mécanismes et l'évolution de ces virus, on peut très bien le faire sous nos latitudes"
Meriadeg Le Gouil, virologue de l'Université de Caen à franceinfo
Avec un collègue vétérinaire, Meriadeg Le Gouil commence à installer les pièges, de grands filets dans lesquels les chauves-souris vont s'emmêler les ailes. "On les attrape au moment où elles vont chercher à manger et là, c'est un point de passage", précise le virologue. Ça ne rate pas : quelques instants plus tard, un spécimen se coince dans le filet en couinant. C'est "un petit mâle qui n'est probablement pas de l'année, pas trop jeune", précise Meriadeg Le Gouil, avant de détailler le protocole : "On le met dans un sac en coton. On va lui faire des prélèvements pour faire de la génétique. Et puis pour rechercher les coronavirus notamment."
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En effet, les chauves-souris sont pour la plupart porteuses de coronavirus, des hôtes, des réservoirs naturels de ces virus. "On lui fait mordiller dans un écouvillon pour récupérer un peu de salive et de cellules de la bouche. En général, elles ont des très bonnes dents, donc on met des gants", glisse le spécialiste.
Les animaux sont ensuite relâchées, car l'idée est de les suivre sur plusieurs années dans leur état naturel. Le virologue détaille les objectifs du projet : "On peut étudier comment fonctionne ces virus dans les chauves-souris ou avec les chauve-souris, comment ces virus interagissent avec leurs hôtes, comment ils se transmettent, comment ils évoluent, à quelle vitesse, quelles sont les causes de leur apparition, de leur disparition, de leur changement..." Il espère aussi "mieux comprendre comment les virus qu'elles hébergent peuvent passer d'une espèce à l'autre", c'est "un paramètre qui est très important", assure-t-il. "Quelles sont les conditions qui permettent à ses virus d'émerger dans une nouvelle espèce ou de passer dans une nouvelle espèce - ce qu'on appelle la transmission zoonautique, ça veut dire quand un virus change d'espèce", précise Meriadeg Le Gouil.
Les zoonoses de plus en plus présentes
On le sait désormais : le Covid-19 est une zoonose - un virus a été transmis aux hommes par les animaux. Ebola, mais aussi le paludisme, le chikungunya et, plus récemment, la variole du singe sont également des zoonoses. Les scientifiques constatent aussi, de fait, de plus en plus d'émergences et de réémergences de ces virus, explique la Dr Muriel Vayssier-Taussat, de l'INRAE, l'Institut de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement.
"On estime que 60% des maladies infectieuses de l'homme proviennent des animaux et que pour les maladies infectieuses émergentes, c'est les trois quarts qui auraient une origine animale", indique la chercheuse. Autant de raisons d'étudier ces zoonoses : s'il y a de plus en plus d'humains sur Terre, en agrandissant les villes, on bouleverse l'habitat des animaux et il y a donc de plus en plus d'interactions entre les espèces.
Pour faire face à ces zoonoses, un concept se développe et est de plus en plus mis en avant par la communauté scientifique internationale : l'approche One Health, "santé unique". En clair, la santé des animaux et celle des hommes sont inter-dépendantes, et si l'on étudie et protège la santé des animaux, on protège l'Homme également, et inversement.
La France vient ainsi de débloquer des budgets de recherche spécifiques. Car la clé de compréhension des futures pandémies se niche peut-être dans nos grottes françaises.