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Art urbain à  Paris
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Citation :Ce texte concernant l'art urbain parisien des trente dernières années n'engage que moi. Il m'est impossible d'y insérer des photos, je peux néanmoins les envoyer par mail ou les publier par notes. Toute reproduction, même partielle, de ce texte est strictement interdite. Pour toute demande, postez une note sur mon blog, je vous répondrais par mail.

Merci de bien vouloir prendre ces quelques mots en considération avant de lire ceci.








L’art urbain, c’est la possibilité à  n’importe qui de pouvoir s’exprimer, aussi bien le bon que le mauvais, sans pour autant passer par les chemins que la société nous propose.
Pouvoir exprimer la liberté, en quelque sorte.

(Blek le rat, premier « pocheur » parisien)





Article 322-1 Le fait de tracer des inscriptions, des signes ou des dessins, sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain est puni de 3 750 euros d’amende.





Depuis de nombreuses années on peut apercevoir à  Paris, sur les murs, sur des affiches, des papillons, par des détournements d’affichages publicitaires, ou même directement sur le sol, le développement d’une nouvelle forme d’art, que nous pourrions appeler l’art sauvage urbain (à  ne pas confondre avec l’art urbain, qui lui est légal car commandé par les mairies d’arrondissement, le ministère de la Culture, etc.). Il semble que ces formes graphiques d’intervention ont littéralement explosé dans les années quatre-vingt-dix et encore aujourd’hui. D’un autre côté, il faudrait nous poser la question de savoir comment distinguer art et ce qui relève du vandalisme. Les services de nettoyage de la Ville de Paris ne peuvent faire de distinction entre ces deux phénomènes et doivent forcément effacer ou détruire ces œuvres illégales (car les graffitis, tags et pochoirs ne sont pas les seules applications de l’art sauvage urbain, il existe bien sà»r des sculpteurs mais aussi toutes les personnes qui ne laissent pas de traces, comme les musiciens de rue).

Nous allons donc aborder ce sujet en essayant de comprendre quel rôle l’art sauvage urbain joue dans la ville, tout d’abord en montrant ce nouvel essor de l’art, puis en nous demandant s’il ne s’agit pas là  d’un échec de l’art.



Petite histoire de l’art sauvage urbain


On ne commence à  parler d’art sauvage urbain quâ€™à  partir des années 1980. Auparavant, et notamment en mai 68, graffitis (une méthode très ancienne pour donner son avis, utilisée déjà  chez les Romains), pochoirs (même si la technique est ancestrale, puisqu’on la retrouve dans de nombreuses grottes préhistoriques, le premier pochoir politique datant de la période fasciste italienne, avec une tête du Duce diffusée sur les murs de Rome) et affiches illégales étaient utilisés à  des fins plus politiques qu’esthétiques : il s’agissait d’abord de convaincre, ensuite de jouer sur les mots, les images (on peut même penser que cette tendance s’est inversée à  la fin de cette agitation sociale). En mai 68, différents artistes, tels Calder ou Rougemont, ont aidé les étudiants dans leur démarche, pour fabriquer en grande quantité des affiches. L’art était véritablement au service de la politique. Il n’en reste pas moins que cet événement fut unique, et que durant les années 70 peu d’artistes se risquèrent à  exposer directement dans la rue.



Néanmoins, dès la fin ces années, deux artistes, Ernest Pignon Ernest et Gérard Zlotykamien ont commencé à  exposer dans la rue des affiches peintes, sachant fort bien que leur art serait bien vite détruit. Peu après, ils furent rejoints par des personnages tels que Blek le rat et Miss Tic (qui travaillaient alors en collaboration), Nemo, Mesnager, le Bateleur… Sans pour autant former un groupe d’artistes, ceux-ci se connaissaient, et se faisaient surtout connaître dans les milieux artistiques modernes. C’est dans les années 1990 qu’on vit apparaître une ribambelle de nouveaux artistes, se servant d’affiches (Tom-Tom…), de pochoirs (Buda…), de mosaà¯ques (Space Invader), etc.

L’art sauvage eut beaucoup moins de succès en province, et il reste que Paris est la ville de prédilection de tous ces artistes, avec pourtant des quartiers totalement oubliés (notamment l’Ouest de Paris, peut-être parce que les services de nettoyage s’y montrent plus vigilants et plus efficaces).



Depuis quelques années, on entend de plus en plus parler de ces artistes qui investissent la rue comme lieu d’exposition, soit par choix, soit parce qu’ils sont refusés par des galeries (comme dans le cas d’un jeune artiste qui, après avoir été refusé par le Palais de Tokyo, afficha début 2003 dans le centre de Paris des dizaines d’affichettes « Moi, je n’irai plus au Palais de Tokyo »). L’idée importante à  retenir est que le monde, le peuple se trouvant dans la rue, l’art a sa place à  cet endroit, et non dans les marchés de l’art élitistes, d’après tous ces artistes. Tous agissent de manière illégale : pourtant, pour les artistes des rues de plein jour (musiciens, comédiens…) la police ferme les yeux, tandis qu’elle reste impitoyable avec les peintres, pocheurs, graffeurs, colleurs d’affiches de la nuit, dans la mesure o๠il s’agit là  d’un délit de dégradation. C’est ainsi que la pocheuse Miss Tic s’est vue de nombreuses fois condamnée pour ses pochoirs sur plaintes de particuliers.

Or, peut-on vraiment considérer sur le même plan un banal tag, comme il en fleurit de plus en plus sur les murs, qui n’est en lui-même qu’une signature, et un pochoir réalisé par Nemo, demandant des heures de travail ?



Je pense que la différence entre la dégradation et l’art tient à  cela : l’œuvre d’art urbaine comporte une certaine part de poésie, soit par un jeu de couleurs, soit parce qu’elle joue sur les mots. En effet, le passant ne s’y trompe que rarement : alors que les tags font désormais partie du quotidien, et que nous passons souvent devant eux sans plus les voir, presque lassés par ces signatures unicolores et répétitives (il est fréquent de voir le même tag reproduit des dizaines de fois dans Paris), les graffitis, pochoirs ou affiches attirent notre attention, car ils représentent une nouveauté, égaient la rue en quelque sorte. De même, si les habitués du métropolitain s’étonnent rarement devant les musiciens ambulants, nombreux seront-ils à  s’arrêter pour écouter un poète déclamer ses vers au milieu du quai, ou encore un musicien jouant d’un instrument rare. C’est donc que l’art est ce qui nous fait sortir de notre vie habituelle, d’un point de vue esthétique, en apportant une certains originalité. Par ailleurs, l’art pictural urbain sauvage, s’il anime la rue, le fait de manière plus discrète, mais peut-être plus marquante. En effet, avant que les services de nettoyage de la ville de Paris ne passent les effacer, ces œuvres peuvent attirer le regard du passant durant plusieurs semaines. La naissance d’un nouveau pochoir, d’une nouvelle peinture murale peut évidemment être source de conflit entre particuliers, mais pour le passant, quelle joie de découvrir à  nouveau la rue !


Mais il importe ici d’étudier les différents buts de ces artistes. Certains, et surtout ceux qui offrent un peu de leurs compétences en plein jour, dansant, jouant ou chantant, le font pour gagner de l’argent, sans pour autant exclure de leur activité un certain plaisir. En effet, j’ai rencontré il y a peu de temps un vieil homme, monsieur Jèze, qui faisait du théâtre, seul, à  proximité du centre George Pompidou (Paris 1er arrondissement). Il me disait : « Ce quartier, je le bénis autant que je le maudis. Il me donne une raison de vivre, car ce que je fais ici me plait plus que tout (il m’expliqua que cela faisait 35 ans qu’il venait dans la semaine animer la rue), mais c’est aussi lui qui essuie mes échecs les jours o๠je n’ai pas la motivation nécessaire pour faire rire mon public. » On remarquera que la mission que cet homme de 64 ans s’est lui-même choisie est d’arriver à  éveiller un peu le quartier, « même si ce n’est que fugace ».



Pour de très nombreux autres, l’art dans la rue n’est pas en lui-même une finalité. Il peut être un passe-temps ou une activité très prenante en vue d’exposer un jour dans une galerie. Ceux-là  se font connaître par une signature très particulière (les ombres noires de Nemo, les poèmes de Miss Tic, les détournements d’affiches de Tom-Tom…). Mais leur point commun est qu’ils avouent tous y prendre du plaisir, comme l’avoue Zeus (pour qui la nuit est importante pour s’affirmer dans ce qu’il fait) au cours d’un entretien.



Certains voient également dans l’art urbain sauvage une manière d’éduquer, de sensibiliser la population à  l’art, en reprenant la tradition des muralistes des années 20 et 30. C’est pourquoi les œuvres picturales et les sculptures (en effet, il y a environ dix ans, un artiste du XXe arrondissement avait moulé son visage des dizaines de fois, et en avait collé les reproductions à  des façades) sont d’autant plus présentes dans les quartiers dits populaires de Paris, dans l’Est Parisien.

Nemo, le pocheur aux ombres noires, a ainsi décidé, soutenu par la Mairie de l’arrondissement, de travailler avec des enfants du quartier, à  côté du collège des Amandiers près duquel ils habitaient. Je pense que l’on peut parler d’art urbain dans ce cas, sans lui accoler l’adjectif sauvage, même si celui-ci est réalisé en accord avec la Mairie, car il présente une part de mystère (peu de personnes connaissent le visage de Nemo) et d’interdit à  la fois, puisque ces différents pochoirs ont été réalisés sur des murs de l’arrondissement, comme toutes les autres œuvres (illégales) de cet artiste. Si la Police veut bien fermer les yeux sur ces pratiques tant qu’il n’y a pas plainte de particuliers, les services de nettoyage sont, eux, beaucoup moins conciliants.



Mais l’intervention artistique n’a pas pour but uniquement d’initier la population à  l’art, comme le faisait pourtant Miss Tic, en reproduisant en pochoirs l’œuvre de grands peintres comme Poussin, Léonard de Vinci, Delacroix etc. Elle peut également être un moyen d’attirer l’attention sur des problèmes politiques, parfois internes aux quartiers. En effet, elle peut avoir pour but de diffuser des idées, d’émettre un avis. Rue de Rivoli, dans le 1er arrondissement par exemple, un squat d’artistes laisse déborder une partie de sa production dans la rue pour sensibiliser la population à  leur situation, donc au statut de l’artiste dans la société. Dans le XXe arrondissement, de manière plus anonyme, des pocheurs et graffeurs se sont réunis sous le même mot d’ordre : « Ne détruisez pas nos maisons », en essayant de revaloriser des bâtiments promis à  la destruction, par des peintures, des pochoirs… En agissant ainsi, les artistes savent fort bien que leurs chances de toucher l’opinion publique sur le sujet sont minces, mais ils arrivent néanmoins une dernière fois à  embellir les vieilles pierres de leur quartier, ne serait-ce que pour quelques mois. Les « chasseurs d’art » doivent donc se dépêcher d’aller photographier ces œuvres éphémères mais engagées.



Depuis vingt ans, ces artistes urbains ont sillonné les quartiers, à  la recherche de l’espace idéal, se sont engagés (on peut d’ailleurs remarquer que des artistes comme Blek le rat ont lancé une véritable contre-offensive artistique dès les premières frappes en Irak en mars 2003). L’art sauvage urbain est en continuel mouvement : anonymes ou grands acteurs de ces dernières années, ces artistes ont réussi à  animer la ville coà»te que coà»te, à  faire apprécier un art différent, à  attirer le regard de la population. Le message souvent uniquement politique de 1968 a cédé la place à  un art qui prône le beau, l’amusant, le dérisoire, l’insolite à  chaque coin de rue.



En dehors des œuvres d’art sauvages urbaines, il n’en reste pas moins que les actes de dégradation sont encore là , ce qui pose bien sà»r un problème d’ordre politique : comment subventionner les jeunes artistes et l’art en général d’un côté et appliquer la loi de l’autre ? Car les services de nettoyage de la ville de Paris (nommés OLGA ou Korrigan, que l’on retrouve dans certains pochoirs vengeurs) doivent malheureusement faire leur travail intégralement, et effacer tags, graffitis, affiches, pochoirs… Officiellement l’art urbain est considéré comme du vandalisme.



La manifestation urbaine et sauvage de l’art ne serait-elle pas la preuve d’un échec de la part des politiques en ce qui concerne l’art de la fin du XXe siècle ? Pourtant, les artistes ne manifestent pas non plus leur envie d’être au musée, considérant peut-être que la rue est un moyen simple de s’adresser directement aux gens, de leur apporter l’art en bas de leur porte.



Certains néanmoins, comme Nemo ou Mesnager, travaillent parfois en collaboration avec la Ville de Paris, ou sont appelés par d’autres mairies pour des actions plus ciblées (c’est ainsi que Nemo est parti voilà  quelques années redécorer la ville de Bogota, en Colombie).

Cet art urbain sauvage commence à  se faire connaître du grand public (les artistes essayant néanmoins pour la plupart de garder leurs distances), est de plus en plus accepté en tant que tel. Il s’est en quelque sorte intégré dans la ville. Même si le climat actuel est plus favorable aux extravagances des artistes de rue, le nettoyage, conformément à  la loi, rend cet art éphémère, déploré par certains, encouragé par d’autres artistes, qui voient dans cet effacement régulier comme un stimulant puissant pour recommencer encore et toujours, ainsi que l’expliqua le pocheur le Bateleur, peu avant son décès, en 1996. La volonté de toujours recommencer, et de ne pas considérer les nettoyages comme des échecs, unit tous les intervenants.



Les autorités, la police peuvent parfois se montrer complaisantes avec ces artistes, car il est vrai que cet art appartient à  la rue, et donc au citoyen. La rue a toujours été le cadre d’une certaine expression populaire, autrefois avec les grands carnavals, les défilés. Aujourd’hui, l’art, plus discret, ne faisant intervenir que quelques personnes, mais ouvert à  tous ceux qui voudraient s’y risquer (car c’est une aventure qui se tente) et par là  se forger une signature, un nom, fleurit sur les murs de Paris.

On peut presque parler ici d’art parallèle, en réaction aux grandes expositions et à  l’art moderne des musées. En effet, dans la rue, le message doit être clair, la poésie fugace, et si les références sont parfois recherchées (comme avec Miss Tic ou le Bateleur), elles font appel à  des œuvres souvent assez connues.



Néanmoins, l’art sauvage urbain serait peut-être destiné à  une petite élite de bourgeois éclairés, et non à  l’intégralité de la population, contrairement à  notre première affirmation. En effet, l’art austère de François Morel, les références artistiques de Miss Tic, peuvent nous inciter à  penser que ces œuvres sont réellement dirigées vers un public très ciblé.



Pourtant, si les vandalismes urbains (tags, dessins obscènes à  la craie…) sont incompréhensibles, les œuvres d’art, même recherchées, touchent les passants, ne serait-ce que parce que justement, elles changent de l’ordinaire, et que leur esthétisme est presque choquant dans la rue. C’est pourquoi, même si certaines œuvres sont créées pour un public « averti » et cultivé, aucune ne semble relever de l’élitisme, bien au contraire. C’est probablement ce qui plaît le plus à  ces artistes : la proximité avec le public. Alors que dans les musées, la personne n’est que spectatrice, dans la rue elle peut toucher, contourner, découvrir au fur et à  mesure l’étendue de la production artistique de certains artistes. On peut dire qu’en quelque sorte les artistes urbains offrent leur œuvre à  tous, tout en gardant à  l’esprit que leur art renonce à  conquérir tout le monde.



Pour conclure, nous pourrions dire que le mouvement d’art sauvage urbain reste très controversé à  Paris : peut-on considérer comme de l’art ce qui pour la loi est du vandalisme ? Certains artistes, comme Ben, qui a lui-même fait des œuvres urbaines (mais non sauvages !), pensent que est art ce qui se déclare art. Dans ce cas, pourquoi ne pas laisser leur chance aux artistes de l’éphémère de nos rues ? De quoi laisser aussi le public apprécier ce qui relève de l’art et ce qui est de la dégradation, même si, en fin de compte, beaucoup de ces artistes pochent, graffitent ou peignent pour leur seul plaisir.



Source
[Image: gyrophare-petit.gif]
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Yann a écrit :Article 322-1. Le fait de tracer des inscriptions, des signes ou des dessins, sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain est puni de 3 750 euros d’amende.

Quelle source ? Quel texte ? Quel Code ? (Pénal ?)
"et du fond des ténèbres jaillit la lumière"
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chatter a écrit :Quelle source ?

Reguarde en bas du "quote sinon il y a legifrance

chatter a écrit :Quel texte ? Quel Code ? (Pénal ?)

Pénal bien sur... livre III titre II chapitre II section I ET 322-1
[Image: gyrophare-petit.gif]
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