Mer. 23 Nov. 2005, 11:53
0 | 0 | ||
Je me prépare à mettre en ligne un site de touriste éclairé
J'aimerai vous soumettre le contenu avant la mise en ligne.
histoire de ne pas faire/dire de bétises.
Toutes vos remarques sont bienvenues.
Merci,
rellik
Disclaimer
Pénétrer dans le réseau des carrières de Paris, nâest certes pas chose légale mais constitue la meilleure évasion hors des murs de la capitale sans la quitter.
Voici une petite rubrique pour vous permettre de mieux comprendre une passion souvent méconnue mais surtout mal connue.
L'esprit des Catas
La liberté. Comment vous faire partager ce sentiment indescriptible de liberté ressenti pendant les descentes... Le fait de faire parti des initiés, de vivre la descente à la fois hors de Paris mais en son sein le plus profond
Lâesprit routard. les rencontres sous terre sont toujours inattendues et conviviables. On ne peut pas se croiser dans les galeries sans échanger quelques mots et partager un peu de son paquetage. Le parallèle est saisissant avec les rencontres que lâon peut faire à lâétranger entre routards/backpackers.
Lâesprit dâéquipe. Descendre, câest surtout une aventure humaine. Des amis qui vont partager quelques instants dans un endroit hors du temps.
Le sport. Les catabombes, câest aussi beaucoup de randonnée... Peut-être plus quâon ne lâimagine.
La fête. Entre copains, plutôt que de se retrouver un soir chez Untel pour passer la soirèe, on organise une descente.
Le réseau du 14ème
Un réseau dense et étendu. Les carrières du 14ème, plus connues sous le nom de catacombes, sont avant tout les vestiges dâune exploitation pour la pierre de taille qui remonte au XIIIème siècle. Au XIXème siècle, pour des raisons de sécurité liées aux risques dâeffondrement, le réseau a été consolidé et rationnalisé. Aujourdâhui, le réseau correspond grossomodo au réseau des rues en surface. Il sâétend sur tout le 14ème, de la PC (Petite Ceinture) aux jardins du Luxembourg. Il est toujours entretenu par lâInstitut Général des Carrières (IGC).
Les galeries. Les galeries sont des couloirs taillés dans la roche, souvent murés et consolidés par endroit. Les progressions se font en file indienne, une seule personne de front pouvant ouvrir la marche. Au niveau de la hauteur de plafond, celle-ci varie dâun couloir à lâautre. Les catacombes vous feront regretter dâêtre grand et vous imposeront souvent de marcher courbé...
Les salles. A lâorigine le réseau contenait de grandes salles dâexcavation pour répondre à sa fonction première de carrière. Lors de la consolidation du réseau, ces grandes salles ont été bouchées avec du sable pour éviter la formation de fontis et les effondrements en surface. Il subsiste néanmoins des petites salles, creusées dans la masse des salles originelles. Ces salles sont de diverses natures, elles sont soient des relicats, soient des salles aménagées par les cataphiles dans le sable de bourage. Le réseau est donc vivant, de nouvelles salles sont ouvertes régulièrement. Les salles sont essentielles aux descentes, elle permettent aux groupes de se poser et aux cataphiles de se rejoindre. Aux salles creusées, sâajoutent les salles aménagées au long de lâhistoire, bunker anti-aériens, bunker de commandement allemand sous le luxembourg, salle FFI, VDG, ...
Histoire dâos. Au risque de décevoir les amateurs de séries Z, les catacombes nâont pas le côté morbide que lâon voudrait bien leur prêter. Sauf exception, lâensemble du réseau âhors officielâ est exempt dâos ou squelettes. Lâossuaire officiel des catacombes de Paris se situe sous Denfert-Rochereau, il est accessible par le grand public et est isolé du reste du réseau du 14ème, toutes galeries fermées. Cet ossuaire remonte à la fin du XVIIIème siècle, lorsquâil a fallu vider les cimetières de Paris pour des raisons de santé publique.
Le silence. Pourtant à mille lieues de la grande bleue, les catacombes sont elles aussi un monde de silence. Egaré dans le réseau, le groupe sâarrête, chacun retient son souffle. Lâabsence de son sâimpose, assourdissante. Lâoreille interne cherche vainement ses repères. Ici, le silence est roi.
La lumière. Dans le réseau, lâobscurité est totale, le noir absolu. Chacun est confronté à ses peurs enfantines, au monstre du fond du placard. Mais, finalement, câest la lumière qui fascine le plus. Elle est le fil dâAriane des descentes. Sans elle, pas de progression. Sans elle, lâenvironnement est sans vie, inerte. Avec elle, les ombres dansent et les coeurs sâaniment... Pour sâéclairer, 3 possibilités: la lampe électrique (généralement à LED), la bougie (essentielle pour lâéclairage des salles et la mise en ambiance des lieux de vie), la lampe à carbure pour son côté vintage âmineurâ et son bel éclairage.
Lâeau. 1er constat dâimportance, le réseau est soumis aux contraintes de lâhydrographie. Câest à dire que certains tronçons ou certaines galeries sont plus ou moins innondés selon les saisons. Les couloirs sont donc plus ou moins franchissables selon votre équipement et votre témérité. Personnelement, jâai commencé à descendre en tennis, aujourdâhui je nâenvisage pas de descendre sans mes cuissardes. Au sujet de la saisonnalité, sachez quâelle nâa rien à voir avec celle de la surface. Au contraire, il me semble que les niveaux sont plus élevés en été.
La Température. 15° toute lâannée. Frais en été, moins froid que lâextérieur en hivers. (T-shirt + pullover)
La profondeur. Sauf grosse erreur, elle varie entre 10 et 20 mètres. Il y a de nombreuses dénivélations selon les zones du réseau. Il existe un petit 2nd niveau et un embryon de 3ème. Il est important de noter que nous sommes sous le métro et RER et largement sous les égouts.
Le danger. Le réseau est entretenu par lâIGC pour des raisons de sécurité inhérantes aux batiments de surface. Il nây a donc pas de risque dâeffondrement complet du réseau. Les règles de sécurité sont plutôt des règles de bon sens: avoir de la lumière pour la durée de la descente. Faire attention aux puits. Avoir une carte. Faire attention en montant/descendant les échelles. Eviter les comas ethyliques...
Patrimoine. Le réseau du 14ème est riche dâun patrimoine insoupçonné et hélas très dégradé par de nombreuses génération dâidiots. Galeries et structures de soutien dâépoque, anciens abris anti-aériens, ancien bunker allemand, fontaines, ossuaires, ... mais aussi de lâart contemporain cataphile: graphes et fresques, aménagement et décoration de salle, sculptures, ...
La descente
Entrée/Sortie. Lâentrée et la sortie du réseau se font en fonction des connaissances de chacun. Personnellement, nous préférons rentrer par une plaque discrète au NO du réseau et resortir par une plaque moins discrète au N du réseau. Le fait de rentrer/sortir par des plaques impose dâêtre discrets, rapides, équipés et de faire attention à la sécurité des personnes. Lâentrée traditionnelle dans le réseau, tolérée par lâIGC et la police, se situe dans le sud du réseau, au niveau de la petite ceinture.
Descente. Une descente commence par le choix dâun itinéraire. Autour dâun verre, les membres de la team choisissent leur parcours en fonction dâune durée (A/R soirée, nuit sous terre, ...), ils définissent un ensemble dâobjectifs à réaliser: rentrée par ici, progresser jusquâà salle A, faire une pause, progresser vers salle B, dîner dans B, et ainsi de suite jusquâà la sortie. Ensuite, la team prépare son paquetage: fringues crades, lumière, eau, dîner, réchaud, sucreries, boissons, ... Enfin la descente commence. Pendant la descente, lâitinéraire sera certainement modifié mais il est nécessaire que tout le monde ait validé la durée de la descente... pour éviter les surprises...
Lâorientation. Les catacombes ne sont pas un labyrinthe, bien au contraire. Muni dâune carte du réseau, on peut y évoluer relativement facilement. Il faut néanmoins travailler ses aptitudes à lâorientation pour se déplacer rapidement dâune salle A à une salle B par le chemin le plus court et sans détours inutiles. Le milieu possède ses codes et ses astuces: plaques avec le nom des rues, galeries âcôté levant ou coté couchantâ, injections, vieux cables télécom, chatières, secrets dâinitiés, ... Il faut un peu dâexpérience pour aller vite et énormément pour se passer dâune carte. (Ce qui constitue à mon sens un bon discriminant entre le touriste et le cataphile.)
Le catas sprint. Si vous combinez: testostérone cataphile et envie de rigoler pour les uns, peur du noir et peur de lâabandon pour les autres, vous obtenez le âcata sprintâ. Le meneur de la file indienne se met à courir comme un dératé. Les autres doivent lui emboîter le pas de peur de casser la colonne. La course sâenchaîne sur 100 ou 200 mètre, au mépris des nids de poule, des flaques de boue, et de la hauteur de plafond... Sensations garanties...
L'écosystème
Lâinconscient est par définition stupide. On parle ici de personnes capables de sâengager dans le réseau sans carte, sans connaissance aucune, équipés pour la lumière dâune simple bougie et dâun briquet vide. Si par hasard, au détours dâun couloir, vous entendez le son dâun jumbé, prenez le temps dâaller voir, il sâagit peut-être dâun inconscient musicien qui appelle à lâaide...
Le touriste est lâintermintent du réseau. Il descend de manière occasionnelle, pour voir. Il connait mal le réseau, descend avec ses amis, pour vivre lâexpérience interdite... Il a de la lumière, de quoi passer une bonne soirèe et généralement un vieux plan Giraud, mal scanné, récupéré sur le net. Il rentre dans le réseau par la PC et cultive le rêve secret de rentrer par une plaque.
Le cataphile est lâinitié du réseau. Ses descentes ne sont pas régulières, elles sont systématiques. Il voit dâun mauvais oeil les individus qui penètrent son milieu, sans respect et sans connaissance. Il cultive les notions de territoire, de maîtrise approfondie du réseau. Il ouvre des salles, des galeries injectées, menant ainsi une guerre dâusure contre lâIGC. Sa présence continue dans le réseau, sa chaleur corporelle, sa lumière, ses rejets de CO2, ses pauses pipi, ses poubelles et son activité en général en font un membre à part entière de lâécosystème subterranéen. Le cataphile nâhésitera pas une seconde à passer Noà«l, jour de lâan ou ses anniversaires dans les catacombes. En dernière extrémité, il peut parfois se désocialiser complètement du monde dâen haut pour nâexister que dans celui dâen bas.
LâInstitut Général des Carrière (IGC). Depuis le début du XIXème siècle, ils assurent la sécurité du réseau et du Paris en surface. Ils maintiennent la topographie officielle, délivrent les autorisations nécessaires aux obtentions de permis de construire, consolident les galeries, et essayent de limiter la cataphilie par de très savantes injections de galeries...
Les force de lâordre. Depuis les année 80, la police possède une brigade spéciale pour intervenir dans le réseau. Sous-dotée en effectif, elle ne peut pas couvrir le terrain... Si vous la croisez vous risquez 35⬠dâamende et une sortie accompagnée. Pour limiter le risque, évitez les salles du réseau sud le samedi soir. Quoi quâil en soit, amende ou pas, cette brigade est nécessaire, elle joue un rôle important pour limiter les accès dâinconscients. Si vous passez par les plaques, attention, les policiers de surface sont bien moins compréhensifs. En sortie, éloignez vous vite, ne trainez pas autour de la plaque. Restez à votre place, aimable et souriant en reconnaissant les faits, vous êtes en faute. Certains policiers joue inutilement la provocation verbale, ne rentrez pas dans leur jeu. Les policiers ne sont pas des magistrats.
Lâécosystème. La cataphilie est tolérée faute de pouvoir être empêchée. Il existe une ligne de démarcation intengible entre lâactivité cataphile et sa tolérance par les pouvoirs public. Par exemple, lâentrée PC est laissée ouverte de peur de voir les ouvertures de plaques se multiplier au risque de créer le danger. Mieux vaut une entrée semi-publique connue que des inconscients tombant dans les égouts par erreur. Enjeu de ce fin équilibre, la sécurité de quelques zones stratégiques eut égard à la nature des batiments en surface: prison de la Santé, Hôpital militaire du Val de Grace, Sénat... Fin 2004, lâactivité cataphile a franchit la ligne jaune au niveau de la Santé: résultat, sanction immédiate avec une fréquence accrue des patrouilles de police dans le réseau.
Règles & Usages
Les cartes. Le défi du touriste consiste à trouver une ou plusieurs cartes du réseau. Les débutants commencent avec de mauvaises cartes disponibles sur le net. Peut-être au fil des rencontre, au détours dâun couloir ou en partageant un verre, aurez vous lâoccasion, comme moi, dâen récupérer une meilleure. Sachez patienter. Lâusage veut quâon ne sorte jamais sa carte en public (risque de destruction volontaire par les plus intégristes des cataphiles).
Le tractage. Le tractage est le plus bel usage des catas. Les cataphiles, préparent des tracts tous plus inventifs les uns que les autres quâils cacheront au fil de leur progression dans le réseau. Si vous descendez, amusez vous à chercher les tracts, amenez un classeur à pochettes pour les remonter sans dommage avant de les faire sécher.
La poubelle. Ne jettez rien derrière vous dans le réseau. Remplissez et remontez votre poubelle avec vous. Câest une question de salubrité. Si vous descendez avec des boissons, prenez des canettes aluminium que vous compresserez après consommation. Si vous voyez un tas dâordures sous un puit, ne vous permettez pas dâen rajouter.
Les mégots. idem avec les mégots. Eteignez les, puis jetez les dans la poubelle.
Le pipi. Ne faîtes pas pipi nâimporte oà¹. JAMAIS dans les couloirs dâusage. JAMAIS nâimporte o๠dans les salles. Généralement, vous repererez à lâécart le coin pipi, généralement un puit. Ne créez pas un nouveau spot, ça sent mauvais.
LâOmerta. Lâusage veut que chacun soit énigmatique avec les inconnus. La connaissance du réseau ne se partage pas avec nâimporte qui. Elle se mérite. Certaines salles sont peu fréquentées et méritent de le rester. Tout vient à point à qui sait attendre... Un jour vous aussi, vous atteindrez le Saint Graal: la connaissance des plaques.
Les rumeurs. Si vous croisez un plus touriste que vous, racontez lui les histoires et les rumeurs que vous aurez entendues au fond. Ne vous précipitez pas, laissez le venir. Prenez la pause de lâérudit, parlez en ayant lâair dâen cacher la moitié alors que vous en inventez les trois quarts.
Le partage. Les catacombes, câest la ruralité paysane du XIXème siècle. Il y a toujours une place à table. Boisson, repas, biscuit, chocolat, sucré, salé ou fumé, faites tourner vous serez toujours servi en retour.