Lun. 26 Fév. 2007, 00:16
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mess_ckzone a écrit :Info CKZone: Ce sujet provient d'une division du sujet suivant:<a href="viewtopic.php?t=5197">Moulins de Pantin</a><br><br>http://www.rfi.fr/actufr/articles/086/article_49870.asp
Du grain à moudre pour lâuniversité du 3e millénaire
L'édifice des Grands moulins a été rénové par l'architecte Rudy Ricciotti. Le bâtiment accueillera, entre autres, la bibliothèque centrale de l'université Paris-VII et l'administration. (Photo : Danielle Birck / RFI)
L'édifice des Grands moulins a été rénové par l'architecte Rudy Ricciotti. Le bâtiment accueillera, entre autres, la bibliothèque centrale de l'université Paris-VII et l'administration.
(Photo : Danielle Birck / RFI)
Un nouveau «Quartier latin» est en train dâémerger au sud-est de Paris, dans le XIIIe arrondissement. Câest sur une immense friche industrielle que commence à prendre corps la future Université du Troisième Millénaire. Les premiers bâtiments, destinés à accueillir lâuniversité Paris-VII-Denis Diderot ont été officiellement inaugurés le 7 février dernier et étudiants et enseignants ont commencé à investir les lieux. Les bâtiments, neufs ou réhabilités, comme les Grands Moulins de Paris ou la Halle aux Farines, vont sâinscrire dans un nouvel espace urbain avec des immeubles dâhabitation, des bureaux, des commerces, des écoles, des espaces verts.
Câest un nouveau tournant, on peut même dire une rupture dans la politique de construction universitaire en Ile-de-France. Après une politique de séparation des universités et des villes -accélérée après la révolte de 1968- ou de campus conçus comme de véritables camps retranchés dans la ville, comme la faculté de Jussieu o๠était installée lâuniversité Paris-VII, le mot dâordre est maintenant celui de «lâuniversité dans la ville», dans un vrai mélange avec la vie dâun quartier. Rupture aussi avec la politique dâéparpillement des sites universitaires, cette «dispersion dans des entités minuscules que les universités louent au fur et à mesure un peu partout dans Paris», quâévoquait récemment sur RFI Danielle Pourtaud, lâadjointe au maire de Paris, chargée des universités. Une dispersion stigmatisée par la Cour des comptes dans son dernier rapport. Or lâimplantation universitaire sur la ZAC-Paris rive gauche a cette double caractéristique «à la fois de campus et dâintégration dans la ville, puisque, précise Danielle Pourtaud, les étudiants vont à la fois bénéficier dâun espace avec un jardin dâun hectare et en même temps de bâtiments universitaires implantés dans la ville». Une ville dans la ville qui est en train de sortir de terre.
Et pourtant, la présence des étudiants ne figurait pas dans la première mouture de cette gigantesque zone dâaménagement concerté, cette Zac, prévue initialement âon est en 1991- comme un quartier dâaffaires, sorte de réplique est du quartier de la Défense. Mais quelques années plus tard, la nécessité de désamianter la faculté de Jussieu, par ailleurs surpeuplée, modifie la donne. Et en 2001, avec lâarrivée de la gauche à la mairie de Paris, et à celle du XIIIe, une nouvelle orientation est donnée avec 200 000 m2 de bureaux en moins, plus de logements et plus dâespaces verts, tandis que la surface affectée à lâenseignement supérieur était portée à plus de 200 000m2.
Ilots ouverts et architecture industrielle
Le projet urbanistique de cette zone dite «Masséna» qui va accueillir lâuniversité âune des trois zones de la Zacâ a été confié à lâarchitecte Christian de Portzamparc. Lâoccasion pour celui qui a reçu le grand prix de lâurbanisme en 2004, de mettre en Åuvre à grande échelle sa conception de «lâîlot ouvert» : un compromis entre la rigidité haussmannienne (des immeubles identiques et collés les uns aux autres, des cours sombres, des rues sans aération) et lâurbanisme de lâaprès-guerre, puis des années 70, o๠tours et barres sâaffranchissent de la notion de rue. Lâîlot ouvert va jouer, lui, sur un espace restreint, de la diversité de constructions articulées autour de cours et de jardins laissant pénétrer la lumière. Le tout quadrillés de rues. Une diversité garantie par les grands noms de lâarchitecture française et internationale qui participent au projet.
Une architecture contemporaine qui nâexclut pas la présence de bâtiments anciens quâon a réhabilités, comme lâimmense édifice -près de 30 000 mètres carrés- des Grands Moulins de Paris, construit entre 1917 et 1921, et la Halle aux Farines, qui lui fait face, construite en 1946. Ou encore lâancienne usine dâair comprimé Sudac et sa cheminée classée, un édifice de la fin du XIXe siècle transformé par lâarchitecte Frédéric Borel, et qui va accueillir lâécole dâarchitecture de Paris-Val-de-Seine fin avril 2007. Lâédifice des Grands Moulins, réhabilité par Rudy Ricciotti, accueille lui la bibliothèque centrale de Paris-VII, le restaurant universitaire, les services administratifs et les unités de formation et de recherche de lettres et sciences humaines, tandis que dans la Halle aux farines, rénovée par Nicolas Michelin, se trouvent principalement les lieux dâenseignements, amphithéâtres et salles.
Avec les quatre bâtiments dédiés aux unités de formation et de recherche (UFR) de physique, de biologie et de chimie, ce sont six bâtiments qui seront affectés à Paris-VII dâici la fin de lâannée. Auxquels il faut ajouter, à lâhorizon 2009, le bâtiment de 30 000 m2, destiné à abriter lâInstitut national des langues et civilisations orientales (Inalco).
Université du 3e millénaire ou université du pauvre ?
Si tout le monde sâaccorde pour dire que globalement câest mieux que Jussieu, il y a des voix pour trouver que le projet n'est pas suffisamment ambitieux pour une université française du 3e millénaire. «Longue vie à lâuniversité du pauvre», écrivait récemment Julia Kristeva dans Le Monde. La psychanalyste, écrivain et enseignante, directrice de lâEcole doctorale «Langue Littérature, Image», est signataire avec une petite vingtaine dâenseignants dâun texte signalant certains des dysfonctionnements du nouveau campus. Elle estime que les moyens mis en Åuvre, les édifices proposés ne sont pas à la hauteur de ce qui est appelé à être «le grand site universitaire des cents ans à venir à Paris» et que, dit-elle, «la République mésestime ses enfants». Pour Danielle Pourtaud, au contraire, «cette université pluridisciplinaire quâest Paris-VII-Denis Diderot, était la plus à même de sâapproprier ces bâtiments industriels, dont il est formidable de garder des traces». Un sentiment que partage, de son bureau du 8e étage des Grands Moulins, Marthe Tournou, responsable administrative, du Centre du Vivant et du centre Georges-Canguilhem, tous deux rattachés à lâInstitut de la Pensée contemporaine. Pour elle, la réhabilitation est une réussite, le bâtiment a une dimension humaine, on sây repère facilement, et «il est touchant dâimaginer que ces grandes salles qui ont abrité une activité alimentaire, primordiale et vitale, abritent maintenant des sciences dédiées au vivant».
Côté étudiants, certains sont sensibles aussi à la présence de cette mémoire industrielle, comme cette étudiante en troisième année de chinois, rencontrée dans un amphithéâtre de la Halle aux Farines, qui, en plus de l'espace, «le grand luxe» par rapport à Jussieu, apprécie «ce côté brut du béton qui lui donne l'impression d'être encore dans une usine». Tandis que d'autres n'y voient que l'inachèvement des locaux... Quoiquâil en soit, ce nâest guère que dans une dizaine dâannées que lâon pourra juger de la pertinence de ce très vaste ensemble universitaire et urbain, de cette ville dans la ville, baignée par la Seine, à lâombre des quatre tours de la Bibliothèque nationale. Mais la voir sortir de terre est déjà très beau.
--Alzi