Jeu. 14 Oct. 2004, 19:52
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Paris périph
Documentaire de Richard Copans (France, 2004). 55 mn. Inédit.
Câest aux sujets ingrats quâon reconnaît les maîtres. Richard Copans a relevé le défi, il sâest « cogné » le périph : je vais vous le faire aimer, ce fichu monstre... Et pour nous entraîner dans son sillage, il sâest fait magicien de la ferraille, du bitume et du béton. Pour commencer, un pâtit tour en voiture, avec un automobiliste parmi le million qui vient chaque jour y transiter.
Le périph est un boulevard sans trottoir, ni croisement, ni feu rouge, interdit au piétons, certes. Mais Copans préfère y voir un « fleuve avec ses deux rives ». Et câest en bordure de ces rives que viennent sâéchouer les morts : du cimetière de Saint-Mandé à celui des Batignolles, nous voilà sur la tombe dâAndré Breton. Le silence est dâor, et du surréaliste à un groupe de sourds-muets racontant avec force gestes des histoires de cheval, il nây a quâune bretelle de goudron. Vous ne suivez plus ? Ce nâest pas grave, entre Pantin et la Villette, une sorte de Boudu sauvé de lâapocalypse, un dénommé Charron, bien vivant lui, nous invite en son royaume des Enfers, une caravane échouée sous le tablier qui répercute le grondement des camions. Des vivants, on en trouve de plus en plus autour du périph, et même des personnages importants, en costume, qui parlent dâ« économie de la ville », dâ« atout indéniable », dâ« accessibilité ».
Richard Copans nous emberlificote-t-il lorsquâil nous parle de la « plus belle avenue de Paris » et que défilent immeubles disparates de briques, de béton, de verre, ou lorsquâil laisse un architecte évoquer lâ« adaptation de cette fantastique couronne qui fait vivre la capitale » ? On quitte son périph avec une seule certitude : le monde appartient aux maîtres des images et du son...
Vincent Remy
Télérama n° 2856 - 8 octobre 2004