Sam. 25 Sep 2004, 18:42
0 | 0 | ||
Citation : mardi 21 septembre 2004[url][/url]
Sous terre, les vestiges du Brest d'avant
Cliquez pour agrandir la photo
Le personnel soignant de la résidence Ponchelet explore l'ancien hôpital souterrain qui abritait jusqu'à 1200 personnes pendant les bombardements.
L'abri Sadi-Carnot, l'ancien hôpital sous-terrain Ponchelet-Delcourt, la crypte de Saint-Louis : ces vestiges ensevelis du vieux Brest témoignent du martyre subi par la ville en 1944.
Une pluie de fer et de sang s'est abattue, enfouissant la ville dans ses décombres. Soixante années plus tard, le vieux Brest ne survit que dans l'imaginaire collectif, l'esprit des anciens et quelques lieux sous terre, presque dans le secret. Infimes vestiges oubliés d'une cité martyre.
Sous la résidence Delcourt, entre la place Kerusenn (la chapelle Ponchelet) et la route du Gaz, se cache l'ancien hôpital souterrain. On y pénètre en poussant une porte anodine. Quelques pas vers les profondeurs, c'est une plongée dans le passé douloureux de la ville.
Fragments de mémoire
Au plus fort des bombardements qui ont précédé l'évacuation, jusqu'à 1 200 personnes se sont réfugiées dans cet abri creusé en 1943 sous la responsabilité de l'ingénieur en chef Destrade, de la Direction des travaux maritime. Moins connu que le tristement célèbre abri Sadi-Carnot, c'était l'unique refuge du haut Brest. Soixante-quatre obus sont tombés sur l'hôpital durant les deux mois de siège.
Derrière le cadre soignant Geneviève Guillou, une lampe-torche à la main, les infirmières nous guident dans la pénombre. Elles découvrent ces tréfonds, se recueillent, imaginent le quotidien du personnel hospitalier, en aoà»t 1944. Tout au long du couloir, les blessés s'entassaient sur des lits. Une résidente de leur hospice avait accouché ici. Plus généralement, c'est malheureusement la mort qui l'emportait.
L'hygiène était déplorable, la promiscuité de mise. « Le passage est étroit », note l'une des jeunes femmes. Il fallait se faufiler en portant les brancards, parfois remonter à l'air libre jusqu'au bâtiment principal, afin de sauver la vie des blessés. Pendant les grands bombardements, les médecins ont aussi opéré sous la terre, dans un bloc chirurgical bien outillé. Il ne reste aujourd'hui que le support des lits et quelques prises électriques que le temps a épargnées.
Autre décor. Dans son salon, le père Le Gall montre la principale « richesse » du presbytère Saint-Louis : un tableau très coloré de Maurice Cadic représentant l'église et les halles adjacentes, un jour de marché, en mai 1939. On aperçoit l'entrée de l'édifice et les deux statues de Saint-Pierre et Saint-Paul, qui sont d'ailleurs toujours entreposées au musée municipal. Le nouveau curé aimerait qu'elles revoient la lumière.
L'autre trésor se trouve ailleurs. Sous l'église moderne, la reconstruction a préservé quelques vieilles pierres. Des éléments du péristyle de la vieille abbatiale dont la première pierre fut posée en 1688. On imagine aisément l'entrée principale, exactement positionnée comme l'actuelle. De chaque côté subsistent les débuts des escaliers qui menaient au clocher.
L'église Saint-Louis a été incendiée par les Allemands le 14 aoà»t 1944. Simplement parce qu'une rumeur affirmait alors que des francs tireurs s'étaient postés dans la tour. Le chanoine Courtet avait assisté, impuissant, à cet événement qui dura toute la nuit. Au petit matin, il ne restait debout que des murs calcinés.
Le témoignage le plus saisissant du vieux Brest était constitué par l'ancienne rue Lapérouse. Elle est ensevelie sous la rue de la Porte, à Recouvrance. Le visiteur pouvait déambuler entre les maisons qui n'étaient enfouies qu'au niveau du premier étage. Toutefois, il a fallu la condamner en 1995 lors de la construction d'immeubles d'habitation. C'est, encore, un fragment de la mémoire collective qui a disparu.
Frédéric BARILLà.
-- h2o
Sauvez une hague, mangez un cataphile.
Sauvez une hague, mangez un cataphile.