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Haut-Rhin : feu de déchets à  600 m sous terre
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Article et photos à  lire ici: (il date de juillet 2002):
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Citation :Haut-Rhin: Feu de déchets à  600 m sous terre
publié le Samedi 10 juillet @ 03:03:34 CEST

interventions

Lorsque les pompiers du Haut-Rhin sont appelés en renfort pour un feu de 1 500 tonnes de déchets « ultimes » se trouvant sous terre, ils ne se doutent pas qu’il faudra plus de deux mois pour en venir à  bout… Retour d’expérience.


Texte > lt-colonel Philippe Schultz, directeur adjoint > Photos > MDPA/B. Henry ; DR > spmag951 novembre 2003

Le 10 septembre 2002, vers 4 heures du matin, une équipe de mineurs des Mines de potasse d’Alsace (MDPA) perçoit une odeur de fumée. Très rapidement, son origine est localisée. Elle provient du site Stocamine, et plus particulièrement du bloc de stockage n° 15. Ce bloc comprend 2 700 m de galeries d’une section de 5,50 m de large et de 3 m de haut. Au moment des faits, sa capacité de stockage est de 5 000 tonnes, mais il n’en contient que 1 500. La provenance de ces déchets est variable*. Le Codis 68 est informé par l’exploitant, peu après 8 heures. Stocamine ne souhaite pas d’intervention particulière, mais tient à  informer les sapeurs-pompiers de l’incident en cours. Le feu est combattu par des équipes de secours composées de mineurs sauveteurs des MDPA renforcés par des agents de Stocamine. Compte tenu du particularisme minier, l’intervention du Sdis n’est, en effet, pas prescrite a priori. Toutefois, face au peu d’informations qui arrivent, l’officier Codis décide, dès 8 h 11, d’envoyer sur place un chef de groupe, bientôt rejoint par un chef de site.
La salle opérationnelle est activée, en préfecture, vers 9 heures. L’information reste imprécise. Face à  cette situation, le préfet décide, sur proposition du Sdis, de demander l’intervention du Dicamine (voir encadré). Celui-ci est mis en alerte à  11 h 09 et se présente sur le carreau de la mine Amélie à  Wittelsheim, au puits de descente des secours, à  15 h 26.
Un point de situation est fait. Une action de reconnaissance est engagée, par le Dicamine, vers 17 heures. Il est alors décidé de renforcer les moyens d’attaque en établissant une ligne de 70 mm alimentée sur une conduite d’eau de deux pouces, au fond de la mine. Plus de mille mètres de tuyaux seront utilisés dans ce sens. Vers 19 h 00, deux petites lances fonctionnent tant bien que mal, tandis que quelques travaux de déstockage tentent de permettre une meilleure approche du feu. La ventilation de la mine, appelée « aérage », facilite l’accès, les mineurs sauveteurs ayant le vent dans le dos. Pourtant, vers 22 heures, les personnels constatent la présence de divers matériaux susceptibles de présenter un risque d’explosion (bombes aérosols, bidons renfermant des produits liquides, etc.) La décision est alors prise de désengager les équipes d’attaque et de privilégier le confinement du bloc par la mise en œuvre de barrages. Ces travaux sont entrepris dans la nuit par les mineurs. Les équipes du Dicamine, après avoir été mises à  rude épreuve, quittent le carreau tôt dans la matinée du 11 septembre, pour rejoindre leur base en Moselle.

Le feu n’est pas éteint…

Le lendemain matin, la fumée s’échappe toujours du puits Else. La polémique, quant à  elle, gagne du terrain, nourrie par l’inquiétude grandissante des riverains, des syndicats de mineurs…. Elle nécessitera un investissement important des responsables publics, sans oublier les médias, durant de longues semaines. La phase de confinement est confirmée par le préfet, directeur des secours. A partir de là , il ne s’agit plus que de surveiller. Des mesures atmosphériques sont réalisées heure par heure, tant au puits d’évacuation des fumées que dans le retour d’air, au fond de la mine. Ces dispositifs permettront d’informer le public sur la nature et la concentration des gaz provenant de la combustion. Moins d’une semaine après le déclenchement du sinistre, plus aucune émission de gaz toxique ne sera relevée à  la sortie du puits Else. Mais l’inquiétude de la population, et la polémique qu’elle entraîne, ne désenfleront pas pour autant.



Une visibilité de moins de 2 mètres

Le 20 septembre, le Sdis procède à  une première reconnaissance dans le bloc 15, en pénétrant dans l’enceinte par le retour d’air. Deux officiers sont accompagnés de deux responsables de Stocamine. L’accès et les conditions dans le bloc sont difficiles, même si plus aucune fumée ne s’échappe par le puits depuis quelques jours. La température ambiante avoisine les 40 °C alors que la visibilité, conséquence du confinement, est inférieure à  2 mètres. L’équipe chemine prudemment dans les allées, sous protection respiratoire et en tenue étanche. Aucune activité visible n’apparaît au fond, en tout cas aucune flamme n’est perceptible. A la suite de cette reconnaissance, le choix du confinement est maintenu par le préfet. Durant tout le mois d’octobre, les contrôles atmosphériques vont néanmoins attester l’existence d’une combustion à  l’intérieur du bloc 15. Des concentrations significatives en CO2, CO, SO2, pour ne citer que les plus importants, traduisent bien une activité. Un mode opératoire est alors proposé par le Sdis et adopté par le préfet. Le 28 octobre, une nouvelle reconnaissance est engagée par le Sdis, avec les mineurs sauveteurs des MDPA et des cadres de Stocamine. L’objectif est de localiser, à  l’aide de deux caméras thermiques, la présence d’éventuels points chauds.

L’intervention s’organise…

Les équipes sont constituées sur la base de la mixité entre mineurs et sapeurs-pompiers, de manière à  disposer à  la fois de l’expertise minière et de l’appréciation du professionnel du feu. Ce principe sera respecté tout au long des descentes qui suivront. Le COS, officier du Sdis, aura un contact permanent avec un ingénieur fond des MDPA, ce qui facilitera la coordination. Chacune des descentes mobilisera en moyenne une dizaine de pompiers et une vingtaine de mineurs sauveteurs. Le poste de commandement opérationnel est installé au fond. Une liaison téléphonique permet de communiquer avec un poste de commandement jour, lui-même en relation avec une équipe de mineurs sauveteurs en réserve et avec le Codis. La médicalisation est assurée par un médecin sapeur-pompier et le médecin des mines. Des contrôles d’explosimétrie sont réalisés en continu par les équipes engagées, la mine étant réputée « grisouteuse ». Autrement dit, le risque de formation de poches de méthane d’origine géologique, donc d’explosion, existe en continu.
La descente, depuis le carreau de la mine Amélie 1, dure un peu plus d’une minute pour 600 mètres…, alors qu’un gros quart d’heure est nécessaire pour rejoindre le bloc 15 au moyen d’engins miniers au Diesel appelés TP 13. L’ensemble des personnels est équipé de protection respiratoire, appareils à  circuit fermé pour les mineurs, ARI bi-bouteilles 6,8 litres 200 bars pour les pompiers, ainsi que de tenues étanches. Un point de regroupement des moyens logistiques est organisé à  proximité de l’entrée dans le bloc 15, le tout bénéficiant d’une arrivée d’air constante, pour éviter un retour des fumées contenues dans le bloc.
Toutefois, chaque équipe ne pourra travailler à  l’intérieur du bloc qu’un maximum de 35 minutes, tant les conditions d’interventions seront difficiles. Un maximum de trois rotations sera effectué par les sapeurs-pompiers lors d’une descente qui dure en moyenne 5 à  6 heures. Il est communément admis que chacun des intervenants a été, à  chaque fois, allégé de 2 kg entre la descente et la remontée… !

370 °C au cœur du foyer

Le 28 octobre, soit 48 jours après le déclenchement du sinistre, des températures allant jusquâ€™à  370 °C sont encore mesurées,au cœur de certaines zones de stockage, malgré le confinement. Il est alors décidé de renforcer ce confinement par l’injection d’azote. Cette idée sera mise en œuvre, en continu, pendant une dizaine de jours, début novembre, ce qui fera descendre le taux d’oxygène, pendant plusieurs jours, à  moins de 4 %... ! A l’issue de cette période d’inertage, force est de constater que, malgré une meilleure visibilité au sein du bloc, des températures importantes persistent au cœur du stockage. Ce phénomène permet de confirmer une hypothèse que nous avions formulée, à  savoir une auto-combustion de certains des matériaux entreposés.
Face au constat de la poursuite d’une activité de combustion, confirmée par l’analyse des prélèvements atmosphériques, le COS préconise une idée de manœuvre consistant à  refroidir le milieu réactionnel par injection d’eau dans le cœur du stockage. Deux lances spéciales seront confectionnées dans les ateliers du Sdis, un peu à  l’exemple des fameuses lances « Bourgeois ». Elles seront alimentées chacune par un tuyau semi-rigide de 22 mm, branché sur une division 40 DSP – 2X 22 GFR. L’alimentation sera assurée par une conduite de deux pouces en polyéthylène, installée par les mineurs. Le débit d’eau disponible reste toutefois faible, autour de 10 m3 / h. Mais une pression statique d’une quinzaine de bars permettra, en partie, de compenser le manque d’eau. L’extinction est engagée à  partir du 7 novembre et sera poursuivie lors de deux descentes supplémentaires, les 12 et 15 novembre. Au fur et à  mesure de l’extinction, la visibilité dans le bloc s’améliore.
Le 21 novembre, en milieu d’après-midi, soit deux mois et dix jours après le début du sinistre, le COS pourra faire remonter le message : « Feu éteint » ! Près de 50 heures de présence active au fond auront été nécessaires aux sapeurs-pompiers du Haut-Rhin, sans compter le travail de préparation et les opérations de prélèvements effectués par MDPA et Stocamine. Ce sont les actions conjointes de reconnaissance, confinement, inertage à  l’azote, refroidissement et extinction à  l’eau, le tout efficacement coordonné par l’autorité préfectorale, qui auront enfin eu raison de ce sinistre hors du commun.

Le Dicamine : un détachement d’intervention unique

Le Détachement d'intervention de catastrophe aéromobile spécialisé en « Mission d'intervention en environnement souterrain » est un détachement mixte composé de sauveteurs volontaires des HBL et de sapeurs-pompiers entraînés par les soins des HBL, à  l'utilisation des appareils respiratoires à  circuit fermé et aux techniques minières. Ce détachement est placé, en opération, sous le commandement d'un officier de sapeurs-pompiers épaulé sur le plan technique par un ingénieur des HBL.
Il est appelé à  intervenir à  la demande des autorités (préfet, ministère des Affaires étrangères, ministère de l'Intérieur) pour porter secours, assistance et conseils en cas d'accident en milieu souterrain (tunnel, mine, stockage ou parking souterrain). Officiellement créé le 28 aoà»t 1997, le détachement a été appelé à  intervenir pour la première fois le 10 septembre.



En conclusion

De nombreuses questions demeurent ouvertes à  l’heure actuelle. Pourquoi et comment ce feu a-t-il pu se déclarer ? Comment des matières inflammables ont-elles pu se trouver dans ce stockage, alors même que cela ne devait pas être le cas ? Qu’est-ce qui explique l’absence de précisions sur les matières stockées et notamment dans des big-bags classés « déchets amiantés » ?
Les pouvoirs publics, et non en dernier lieu la justice, sont toujours à  la recherche de réponses. Les conséquences économiques de ce sinistre sont d’ores et déjà  très lourdes : fermeture prématurée de l’exploitation des Mines de potasse d’Alsace et remise en cause de l’avenir de Stocamine. Un seul point vraiment positif doit être souligné : aucune victime n’est à  déplorer. Pour le reste, il faut espérer que les acteurs de cet événement prennent toute la mesure de leurs responsabilités, pour que rien de tel ne puisse se reproduire.
Stocamine

En février 1999, dans le contexte du démantèlement progressif des MDPA, un site souterrain de stockage de déchets ultimes est créé sur la commune de Wittelsheim : Stocamine. Située à  600 m sous terre, la zone de stockage est isolée de la surface par 300 m d’argile et de dépôts, ainsi que par une couche de 300 mètres de sel gemme. En dessous des espaces de stockage, 1 000 mètres de matériaux salifères complètent ce dispositif naturel d’étanchéité. Stocamine est le premier centre français de stockage souterrain de déchets « ultimes ». Le principe de la réversibilité de ces déchets a également été retenu lors de la conception du site. La capacité totale de stockage du site, fixée par arrêté préfectoral, est de 320 000 tonnes, pour une durée d’activité de 30 ans. Stocamine est autorisé à  recevoir des déchets de toute la France et de l’étranger.
La liste des produits susceptibles d’être acceptés par Stocamine comprend, à  titre d’exemple, des sels de trempe, des déchets arséniés, des terres polluées par des métaux lourds, des résidus de l’industrie de l’électronique, des produits phytosanitaires non organiques, des résidus provenant de l’incinération des déchets, etc. En revanche, d’autres produits sont a priori exclus : les produits radioactifs, les toxiques biologiques, les produits gazeux, les mélanges indéfinissables et… les produits inflammables !


Pièces jointes Miniature(s)





-- h2o
Sauvez une hague, mangez un cataphile.
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