Mer. 31 Jan. 2007, 07:52
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Week-end dans les catacombes de Paris, les interdites, pas celles-de Denfert-Rochereau. Douze heures de crapahute dans le dédale de Paname sud, XIVème et Vème arrondissement. Fernand en est ressorti avec la conviction dâêtre, à lâinstar de Théophraste Longuet, la réincarnation dâun prince des voleurs, Cartouche ou Frédéric Lemaître. Le voyage commence par un boyau étroit planqué dans un tunnel de la petite ceinture. Il se poursuit avec la rencontre dâune cour des miracles sympa et odorante (kabalant vaguement dans le skin head ou le gothique), recluse pour un cool trip ou une séance de tag, loin des lourds préparatifs dâune finale de football. Passés les check-points de dâjeunâs, en route pour le profond, lâhumide, le crayeux, le bizarre. Le calme, surtout, sombre et isotherme. On longe dâabord les tuyaux de plomb gainant lâancien réseau téléphonique de Paris, on monte religieusement lâescalier "Colonel Rol-Tanguy" qui paraît-il fut déterminant lors de lâinsurrection dâaoà»t 44 (Lâescalier fut déterminant. Rol-Tanguy aussi, mais ça on le savait déjà ). On chemine dans les galeries fugacées par le rai bleu de la lampe frontale. Des fois on lâéteint, on se tait et on écoute. Rien. Du sépucral pur jus, qui fout les jetons ou repose. Sensation agréable somme toute dans lâair un peu épais, vicié. Gilles Thomas, notre Gaspard, est un puit de connaissance, un guide hors pairs, intarissable. Lâeau claire filtrée à la craie floque les fonds blancs et gras des galeries. On patauge dans les XVIIIème et XIXème siècles au gré des panneaux au noms gravés des anciennes rues de Paris, des côtes administratives de lâinspection générale des carrières, des autographitis de Henri Poincaré ou dâEmile Gérard. Nous voilà sous le cimetière du Montparnasse, "rue" Alexis Demon, impressionnant mikado dâos longs humains oຠcalotent par-ci, par là , quelques rares crânes oubliés par les pilleurs nécrophiles. Une galerie de vidange, dit-on. La vie dâange est au-dessus, bien au-dessus, à lâair libre. Le temps est passé, il nous faut revenir, douze heures déjà que lâon chemine. Nous retournons, lâhumidité aux arpions et lâoxygène en dette, juste le temps de balayer à la frontale une saillie dâinsurgés de 1871 que gomme la patiente calcite : la commune ou la mort ! A moins quâun tag idiot du finaud groupe "Frotte Connard" nâécourte le temps de ces mémoires prolétaires et/ou révolutionnaires figées dans la boyasse de ce qui fut en bas.
On marche, la main à nouveau rampante sur les tuyaux de plomb. Ca sent le solvant, la pisse, le dégueuli, le shit, lâalcool, signes que nous revenons à la civilisation. Derniers mètres courbé avant la sortie, ultime bosse dans le syphon de sortie. Le tunnel ferroviaire sent le vieux goudron, la chaleur épaisse de juillet avec sa lumière rousse au bout. On escalade le parapet du pont de la petite ceinture, les veaux agités tricolores, toutes cornes de brumes sorties, sont là . Fernand est las.
- Pffffff, patron, je retourne là -dessous.
- Mais non mon bon, Zidane y va marquer !
- Oui, ben moi patron, Fernand y va parquer !
- Comme tu es drôle. Mais tu es de ce monde, mon bon ! Allez ce soir, pas de finale, on va se passer les Gaspards et on rira à la mémoire de ceux dâen bas.
- Chouette, patron.
(*) Catacombes vient du latin Catatumba, du grec, cata, en-dessous et tombos, tombe. Alors quâen français combes signifie trou⦠Câest chié les mélanges, patron.
--> Même pas mort mais déjà six pieds sous terre <--