Mer. 07 Dec. 2005, 14:07
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Citation :Loin des images d'Epinal, o๠la tauromachie cède au kitsch religieux, la photographie ibérique contemporaine propose un panorama vivant. Chez le galeriste Luis Adelantado par exemple, le jeune Sergio Belinchon pose son Åil affà»té sur lâespace urbain et restructure les sites naturels en les transformant en décors. Sa série intitulée « Métropolis », elle, signe une poétique de la ville o๠lâombre de Fritz Lang nâest pas seulement due à la coà¯ncidence du titreâ¦
Le travail de son presque homonyme Raà¹l Belinchon explore la figure du couloir, de la travée, de l'allée, tous ces lieux qui séparent autant qu'ils relient. Recherche passionnante, mais la réalisation trop maniérée, trop esthétique de Belinchon laisse l'émotion à la porte.
Plus réaliste, lâunivers photographique exposé chez Juana Aizpuru est d'une grande richesse formelle et thématique. Rogelio Là³pez Cuenca fait de la signalétique, qu'elle soit urbaine, routière, utilitaire ou publicitaire, sa grille de lecture du monde. Les images de Cristina Garcàa Rodero explorent les rites vaudous en Haà¯ti o๠les corps en souffrance, en transe, sont comme pétrifiés - le travail de cette artiste confirmée autour de lâEspagne occulte est visible sur le site de lâAgence Vu dont elle est membre et sur librodenotas.com ; sa recherche sur les enfants est publiée sur zonezero.com. Jordi Colomer, jeune photographe qui fait passer le langage au statut de sujet aime aussi à se livrer à des performances vidéos quasi Oulipiennes. Ainsi, l'expérience de filmer intégralement le lendemain d'une fête depuis douze appartements dâun même immeuble, performance vidéo dont il sâexplique sur creativtv.net.
La galerie Max Estrella a exposé, lâan dernier, la recherche de Dionisio Gonzà lez sur les favelas de Sao Paulo et de Rio de Janeiro. Le photographe met à nu lâarchitecture des bidonvilles faite de strates hétérogènes, et met ainsi à jour l'histoire de ces cités désolées - lire aussi un entretien, en espagnol, avec lui sur artszin.net. Un travail en résonance avec celui dâAitor Rotiz, toujours exposé chez Max Estrella, mais qui, lui, explore en noir et blanc les figures architecturales de Bilbao, les rendant tour à tour abstraites, et passablement kafkaà¯ennes. Sur le site d'une galerie luxembourgoise, un autre pan de son oeuvre se déploie o๠flou et lignes pures construisent un bel espace poétique.
Chez Kowasa, plusieurs générations de photographes se côtoient et révèlent près d'un siècle de lâhistoire photographique espagnole : Espagne traditionnelle croquée par Eugeni Forcano, combats des républicains espagnols contre les nationalistes suivis par Augustà Centelles - qui fut interné de mars à septembre 1939 au camp de Bram et fit passer à l'extérieur une valise de négatifs -, univers intime dévoilé par Rafael Navarro - dont on peut voir un entretien vidéo sur creativtv.net - et tirages alternatifs mis au point par Carlos Barrantes.
A visiter sur le site de la très active galerie Oliva Arauna, un fragment dâune belle exposition de la jeune Alicia Martin dont lâobjectif construit des compositions picturales, voire sculpturales, comme ces natures mortes faites d'empilement de livres et de matières imprimées (attention, la galerie s'ouvre sur une image cassée. Pour voir les photos suivantes, il suffit de cliquer sur la petite flèche orange en haut à droite de la fenêtre).
Peut-être un peu trop statique, la mise en scène photographique des êtres et des objets signée de la pourtant très côtée Naà¯a del Castillo est dâune extrême sophistication, tant dans l'agencement que dans la couleur. Belle facture certes, mais le sens, un peu forcé, et le mouvement, trop figé, laissent le regard en surface - plusieurs sites pour explorer son travail : la galerie Dels Angels, la galerie Fucares et la galerie Distrito4.
Jeunes artistes de la galerie Dels àngels, Bleda et Rosa proposent un travail sensible sur la matière. Les effets de la surexposition la déréalisent et lui confèrent une profondeur abstraite, voire philosophique. Sur le site du Musée de Léon, les paysages des deux photographes donnent à voir un espace géographique fortement habité d'une dimension historique, lui offrant sens et profondeur.
Toujours chez Dels àngels, la jeune photographe Mayte Vieta réinvente et redessine délicatement l'espace au moyen d'une colorisation extrême et d'une composition quasi picturale. Certains de ces clichés font penser aux performances de Christo. Elle s'explique en vidéo sur le site humanitats.net.
Magnifique travail sur la lumière de José Manuel Ballester à consulter sur son site perso o๠ses paysages imaginaires méritent également le détour même s'il ne s'agit pas de photos. Un autre pan de son oeuvre, cette fois-ci en noir et blanc mais tout aussi poétique, est à consulter sur le site de la galerie Estiarte, grande galerie madrilène qui expose, entre autres, quelques grands noms de lâart comme Tà pies ou Matta. Sa vision très structurée de l'espace industriel est également d'une grande maîtrise.
Pour se familiariser avec lâunivers du jeune Jordi Bernadà³, un tour sur le site de la galerie Marta Carvera est une belle entrée. Etrange mélange de kitsch très marqué par la culture latino et dâune interprétation poétique de la réalité. Dans la famille kitsch, les photos-montages colorisés de Pablo Genoves remportent la palme.
Membre de l'Agence Vu, qui publie sur son site un portfolio consacré à la danse, Isabel Muà±oz a été au centre d'une exposition organisée pour le Mois de la photo 2004 par L'Institut Louis Lumière à Paris, autour de l'image contemporaine du corps. Autre grande figure de la photographie espagnole, Alberto Garcàa-Alix écrit son journal intime en images et dresse le portrait des marginaux et artistes espagnols. Picassomio.com, bien qu'il s'agisse d'un site marchand, donne un bon aperçu de son oeuvre.
Cette promenade dans la photo espagnole vous a mis en appétit ? Alors, consultez l'index illustrédes invités de Paris 2005 avant de parcourir les allées du Salon. Et, pour parfaire encore vos connaissances, le site de la manifestation PHotoEspaà±a 2005 est la bonne adresse.
Béatrice Kahn
Source Télérama