Sam. 13 Dec. 2003, 14:06
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LE MONDE | 12.12.03 | 13h34
La mise en service, le 16 décembre, du prolongement des lignes E du RER et 14 du métro devrait contribuer à décongestionner des transports publics saturés. La SNCF promet, par ailleurs, d'investir les moyens nécessaires pour améliorer un réseau de banlieue à bout de souffle.
Et si Michel Rocard avait eu raison ? L'inauguration commune, mardi 16 décembre, du prolongement de la ligne 14 du métro, dite Météor, entre Madeleine et Saint-Lazare, et d'un nouveau tronçon de la ligne E du RER (Eole), vers Tournan (Seine-et-Marne) - ouvert au public dès dimanche -, apparaît comme un tardif hommage à l'ancien premier ministre.
En 1989, M. Rocard avait pris la décision, presque unanimement critiquée depuis, de lancer simultanément les chantiers des deux dernières grandes infrastructures de transport en commun de la région parisienne. Les deux projets étaient alors en concurrence directe, pour un même objectif : alléger le trafic sur la ligne A du RER, la plus chargée de tout le réseau transilien, avec d'énormes flux de voyageurs entre l'est et l'ouest de la capitale.
Eole, le projet de la SNCF, semblait directement répondre à ce cahier des charges en reliant, dans Paris, la gare Saint-Lazare aux gares de l'Est et du Nord, avant de desservir la banlieue est. En revanche, la ligne Météor apparaissait à l'époque comme beaucoup plus "parisienne", malgré la volonté affichée de la RATP de l'inscrire dans un maillage régional. Jacques Chirac, alors maire de Paris, voulait relancer son grand projet d'aménagement de la ZAC Paris-Rive gauche autour de la Grande Bibliothèque, installée par François Mitterrand. M. Rocard, dont le directeur de cabinet était Jean-Paul Huchon, l'actuel président (PS) du conseil régional, ne pouvait, disait-on, refuser à son ami Christian Blanc, alors PDG de la RATP, un projet nécessaire pour remettre sur les rails une entreprise démotivée.
Les deux opérations auront coà»té plus de 7 milliards de francs chacune. Cet investissement total de plus de 2 milliards d'euros a représenté pendant plus de dix ans l'essentiel des crédits aux transports en commun de toute l'Ile-de-France.
Pour faire accepter un dossier plus coà»teux que prévu, la RATP a dà» réduire son projet. En octobre 1998, Météor n'a donc été mise en service qu'entre les stations Madeleine et Bibliothèque-François-Mitterrand. Quelques mois plus tard, cette dernière était reliée à la banlieue sud-est grâce à une connexion avec la ligne C du RER. Il aura fallu attendre cinq ans, et 128 millions d'euros de nouveaux travaux, pour que cette ligne de métro arrive enfin jusqu'à la gare Saint-Lazare, fréquentée par près de 500 000 personnes chaque jour.
CONCURRENCER LA VOITURE
Météor devrait ainsi pleinement jouer son rôle par rapport à la ligne A, désormais proche de la saturation avec 60 000 voyageurs à l'heure, soit 1 million par jour. "Météor devrait voir son trafic augmenter de 50 % d'ici deux ans, estime Jacques Rapoport, directeur général adjoint de la RATP. Elle sera reliée à 5 lignes de RER, 3 gares SNCF, 10 lignes de métro et de nombreuses lignes de bus. Avec 350 000 passagers par jour, cette ligne connaît déjà un succès très largement dà» à son confort et à la fiabilité de son système de pilotage entièrement automatique. Elle pourrait être prolongée jusqu'au port de Gennevilliers afin de décharger la ligne 13."
En comparaison, le prolongement en Seine-et-Marne de la ligne Eole du RER paraît modeste. Les travaux n'ont coà»té que 13,8 millions d'euros et le trafic sur cette ligne ultramoderne augmentera de moins de 20 000 voyageurs par jour, pour passer de 178 000 à 195 000 passagers quotidiens. En transformant 6 gares, sur 20 kilomètres, pour leur permettre d'accueillir des rames du RER, la SNCF vise l'objectif ambitieux d'attirer sur cette ligne, qui dessert le centre de Paris, 30 % de nouveaux clients.
L'urbanisation récente de cette partie de la banlieue, qui s'étend jusqu'à 40 kilomètres du centre de l'agglomération parisienne, montre que les aménageurs ont largement anticipé l'arrivée du RER. Lotissements et zones d'activités poussent comme des champignons autour de la future ligne. Au-delà des usagers de la ligne actuelle, la SNCF souhaite donc capter une partie des habitants et des travailleurs de cette banlieue, qui utilisent aujourd'hui leur voiture pour se rendre dans le centre de la capitale, en paralysant chaque jour un peu plus les routes et l'autoroute de l'Est (A4).
La SNCF vient d'annoncer son intention de mettre tous les moyens nécessaires sur l'Ile-de-France afin de reconquérir des parts de marché sur la voiture dans les déplacements des banlieusards de cette région. La rénovation des gares et d'une partie du matériel, symboliquement accompagnée d'un changement d'appellation du réseau de banlieue, désormais nommé "Transilien", devrait y contribuer. Guillaume Pépy, directeur général de la SNCF, a annoncé, le 8 décembre, " la volonté de l'entreprise de mettre l'Ile-de-France aux standards du reste du réseau, et en particulier du TGV".
Deux jours plus tard, M. Pépy présentait un programme de rénovation de la gare Saint-Lazare, qui sera achevé en 2008 après 123 millions d'euros de travaux. En même temps, la ligne Aulnay-Bondy, une des rares à établir une liaison transversale plutôt que radiale vers Paris, a été fermée, et remplacée par des bus, pour les trente mois nécessaires à sa transformation en un tram-train plus performant. Et, le même jour, la SNCF faisait accepter par le Syndicat des transports d'Ile-de-France les modernisations, impatiemment attendues par des voyageurs excédés, des lignes C et D du RER : ces améliorations devraient coà»ter 70 millions d'euros à la collectivité, en particulier à la région.
Christophe de Chenay
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Recul des trajets banlieue-Paris
Réalisée par la direction régionale de l'équipement, l'"Enquête globale des transports 2001-2002" montre que pour effectuer une moyenne de 3,5 déplacements par jour, un chiffre qui reste stable, une grande partie des 11 millions de Franciliens ont retrouvé le goà»t de la marche à pied, qu'ils délaissaient de plus en plus jusque-là . Par ailleurs, Paris continue à perdre de son attractivité, avec un recul important (200 000) des trajets quotidiens vers la capitale. Résultat : la progression de l'usage de l'automobile est beaucoup moins rapide que ce qui était attendu. Elle n'a augmenté "que" de 1 % par an entre 1991 et 2001, contre 2,6 % pendant chacune des cinq années précédentes.
⢠ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 13.12.03
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