Lun. 17 Mars 2003, 13:47
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Plongée dans les sous-sols qui ont fait trembler lâavenue de Choisy
XIIIe. Un mois après lâeffondrement de la cour de lâécole Auguste-Perret, des questions demeurent
Le ballet des bétonneuses ne cesse quâaprès 19h30 sur lâavenue de Choisy, fermée partiellement à la circulation. Devant la cour de lâécole Auguste-Perret effondrée il y a un mois, deux grosses pompes aspirent le béton pour lâinjecter dans le gouffre. «On a 14000 m3 à remplir», précise un ouvrier. Quatre agents de sécurité de la Mairie, vêtus de noir, sont toujours en faction devant lâimmeuble du 101, attenant à lâétablissement.Il avait été évacué le 20 février, en application du principe de précaution.
Dans le quartier, lâeffondrement nâoccupe plus autant les esprits, ce qui nâempêche pas certaines rumeurs. «Il paraît quâil y aurait eu des répercussions dans les parkings», affirme un ha- bitant dâun immeuble jouxtant lâécole. «Certains disent que des bâtiments alentours sont fissurés, renchérit Catherine, une riveraine. Mais je nâai pas envie de mâangoisser. Chez moi, il nây a rien à signaler. Je pense que câest surtout pour les gamins que câest difficile. Beaucoup voudraient réintégrer leur école.»
Depuis lâeffondrement du 15 février, les 900élèves des 35classes du groupe scolaire ont été répartis dans différents établissements, pour certains dans le 20earrondissement, même si la plupart sont restés dans le quartier. Une liaison de bus assure leur transport à partir du parc de Choisy, tout proche des lieux du sinistre. Cette organisation engendre de nombreux inconvénients. «Les enfants sont fatigués. La plupart des manuels et des livrets scolaires sont restés à Auguste-Perret, ce qui pose des problèmes pour leur travail et leur orientation», proteste Nadia, une mère dâélève. Lâinquiétude des parents porte surtout sur lâannée prochaine. «Nous craignons quâils soient définitivement intégrés dans dâautres écoles, avec, à la clé, la fermeture dâAuguste-Perret», poursuit Nadia, qui se plaint du manque dâinformation.
Une nouvelle rencontre a lieu ce soir à la mairie du 13e.Les parents dâélèves se disent prêts à «menersdes actions» si la situation nâest pas éclaircie.
Chiffres
300 kilomètres de galeries historiques sont recensés à Paris.
20 mètres. Câest la profondeur des carrières les plus enfouies.
2300 kilomètres. Câest la longueur du réseau dâégouts et dâeau potable. Les galeries de chauffage urbain sâétendent sur 400 km, celles dâEDF sur 120 km.
21morts dans le seul effondrement mortel de lâIle-de-France, à Clamart (Hauts-de-Seine), en 1961.
Météor suspend sa course en attendant les experts
Dans le 13e, le chantier Météor est en panne depuis quâil a provoqué lâeffondrement de la cour dâécole. La ligne 14 doit être étendue jusquâà Saint-Lazare dès 2003 et désenclaver le 13earrondissement avec la station Olympiades initialement annoncée pour 2006. «Nous sommes en train de reboucher le trou. Deux murs de soutainement ont été élevés, sous le contrôle dâexperts indépendants, explique Anne-Marie Idrac, présidente de la RATP. Dâici quelques semaines, on pourra reprendre le chantier, dès que les experts auront donné leur accord sur la manière dont on peut continuer.» Le tracé ne sera pas dévié. Lâeffondrement reste une énigme. «Ce chantier est surveillé par des géologues qui effectuent des mesures par ondes électriques et ondes radars», affirme Gilles Thomas, coauteur de LâAtlas du Paris souterrain (éd. Parisgramme), qui estime que toutes les précautions ont été prises.
«Des ouvrages sans aucune planification»
Enseignante à lâInstitut français dâurbanisme à ParisVIII, Sabine Barles est coauteur de LâUrbanisme souterrain (éd. PUF).
Comment explique-t-on les affaissements en ville?
Sabine Barles: La qualité du sous-sol est très hétérogène. Surtout pour les couches supérieures, façonnées par des siècles dâactivités humaines, o๠lâon passe dâune zone solide à une zone meuble, dâun mètre à lâautre. Lâeau est un autre facteur. Le gypse, que lâon trouve fréquemment à Paris, se dissout à son contact. Par ailleurs, la remontée des nappes phréatiques, dès les années70, a provoqué une poussée dâArchimède qui a endommagé beaucoup de constructions.
Le sous-sol est-il surencombré?
La plupart des ouvrages souterrains ont été mis en place sans aucune planification, alors quâil existe des plans dâoccupation des sols en surface. Aujourdâhui, si on construit un nouveau métro, soit on lâinstalle à très grande profondeur, soit on lui fait faire des zigzags.
Y-aurait-il eu moyen de construire dâune autre façon?
Oui. Il aurait fallu concevoir des galeries techniques regroupant tous les réseaux et accessibles à lâhomme. Ce qui aurait évité que les câbles encombrent la chaussée. Mais cela coà»terait trop cher aujourdâhui. Seuls les gros projets de rénovation urbaine, comme à la Très Grande Bibliothèque, peuvent se le permettre.
La mémoire meurtrie des galeries souterraines
Les galeries de carrières qui pullulent sous la capitale remontent à lâépoque romaine. Elles ont été creusées au fil des siècles, sur 5000hectares, dans toute lâIle-de-France, afin dâalimenter en pierres les travaux de construction. Celles qui courent sous les boulevards des Maréchaux fournirent, par exemple, les bâtisseurs de Paris jusquâau xviiie siècle. LâInspection générale des carrières surveille ces galeries, comblant celles jugées insalubres par injections de béton.
«Il est dommage de négliger ce patrimoine inestimable», déplore Maud Vivien, de lâOrganisation pour la connaissance et la restauration dâAu-dessoubs-terre.Elle sâinquiète des travaux du futur tramway des Maréchaux, qui reliera le pont Garigliano à la porte dâIvry. Au xixe siècle, militaires, brigades dâinspection et ouvriers fréquentaient les galeries à lâaplomb du tracé, y laissant gravures, dessins, épures, plaques de rues⦠Autant de trésors qui risquent de finir sous le béton.