Jeu. 27 Fév. 2003, 17:25
0 | 0 | ||
Après la Deuxième guerre mondiale, les jeunes Jamaà¯cains délaissent le mento, la musique traditionnelle de lâîle, pour vibrer aux sons du jazz et du rhythm & blues (R&B) venus des Etats-Unis. Pour alimenter en disques les sound systems, ces discothèques mobiles, les producteurs locaux créent leurs propres chansons de R&B, qui prennent progressivement un style jamaà¯cain.
Ska : lâeuphorie des sixties
Cette spécificité jamaà¯caine, câest le contre-temps, câest-à -dire le beat entre les temps, que les musiciens jamaà¯cains accentuent par un coup de guitare, de piano ou de cuivre.Cette "pompe" ou syncope donne naissance au ska et se retrouvera plus tard dans le rock steady puis le reggae. Le rythme alerte du ska caractérise lâépoque euphorique de lâindépendance, célébrée le 5 aoà»t 1962.
A écouter : The Skatalites, The Maytals⦠(1)
Rocksteady : les lendemains qui déchantent
Multiplication des ghettos, difficultés économiques, montée de la violenceâ¦La musique sâen ressent : le tempo ralentit. Les studios, désormais équipés de magnétos deux-pistes, peuvent enregistrer les voix séparément, lesquelles prennent plus dâimportance. La basse électrique remplace la contrebasse. Tous ces changements donnent naissance en 1966 au rock steady, aux accents maussades et contestataires.
A écouter : The Paragons, The Melodians, The Heptones⦠(1)
Reggae : à lâassaut de Babylone
"Le ska est rapide, le rock steady est doux. Et le reggae est dur". Ces propos de Bob Marley (2) résument parfaitement la nouvelle donne musicale dans lâîle. Le rythme sâest à nouveau accéléré en 1968. Dérivé du terme "streggae", qui désigne une femme de petite vertu, le reggae fait la part belle à la basse et à la batterie. Les textes des chansons sont plus revendicateurs. Le dub devient populaire : les versions instrumentales des chansons sont remixées avec des effets sonores. Le pouvoir appartient aux ingénieurs du son, tel King Tubby ou Lee Perry. Au début des années 70, le reggae se fait encore plus âpre : le tempo ralentit, la basse devient omniprésente, les thèmes rastas se répandent.
A écouter : Burning Spear, Max Romeo, The Abyssinians, U Roy, Dennis Brown, Johnny Clarke⦠(1)
Le reggae
Dancehall : lâentrée dans lâère digitale
Dans les années 80, avec la rythmique (riddim) Sleng Teng, le producteur King Jammy fait entrer le reggae dans lâère "digitale". Cette musique numérique, baptisée ragga ou dancehall, fait le bonheur des deejays (ou toasters), qui, en Jamaà¯que, animent les sound systems non pas derrière les platines mais avec le micro. Beaucoup dâentre eux font lâapologie du sexe (slackness) et des armes. Mais dès la fin des années 80, des chanteurs et DJ, souvent rastas, reviennent à des propos "culturels" (consciousness). Quâils soient hardcore ou roots, les artistes recyclent les meilleures mélodies du passé, une pratique courante dès les années 50.
A écouter : Beenie Man, Bounty Killer, Ward 21, Vegas, Buju Banton, Sizzla, Luciano, Capleton, Elephant Man⦠(1)
A peine plus grande que la Corse, la Jamaà¯que a bouleversé la musique moderne en y insufflant un "son" original et révolutionnaire, qui a perpétuellement évolué depuis les années 50. Qui plus est, les Jamaà¯cains ont inventé la fonction de DJ, devenue centrale pour le rap, la techno, le trip hop ou la drum & bass.
(1) hors Bob Marley & the Wailers, liste loin dâêtre exhaustive !
(2) cités par Bruno Blum dans : Le reggae, Librio musiques (2000)