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Version complète : L'intense vie souterraine des carrières interdites
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Article du Parisien sur les carrières de Bougival par l'incroyable Isabelle Masoni, qui n'en est pas à  son coup d'essais.


TRAFICS DE DROGUE, organisation de rave-party, spéléo-party, l'activité grouille dans les sous-sols des communes de La Celle-Saint-Cloud, Bougival, Saint-Germain-en-Laye et Louveciennes les soirs de week-end. Abandonnées depuis plus de trente ans par leurs exploitants, les carrières de gypse et de calcaire interdites au public sont pourtant devenues les repaires des jeunes en mal de sensations fortes.

Le 15 mai dernier, Denis, un jeune homme âgé de 22 ans a disparu dans les obscurs boyaux d'une des cavités de Bougival à  la suite d'une agression. Denis n'a été retrouvé qu'une dizaine de jours après sa disparition. Ce soir du 15 mai, il avait un mystérieux rendez-vous avec des copains dans les catacombes situées sur le parc de la Jonchère à  Bougival. Ces derniers ne sont jamais venus, et selon le jeune homme, le rendez-vous aurait tourné au guet-apens.

Par ailleurs, le 5 novembre dernier, un jeune homme de 22 ans, amateur de spéléologie, a été très grièvement blessé, dans une cavité entre Bougival et Louveciennes. Il a fait une chute de quatre mètres de hauteur, en tentant d'escalader une paroi. Aucun des membres du groupe de spéléologues qui l'accompagnait ne se connaissait. Ils s'étaient donné rendez-vous dans une de ces grottes via Internet.

Ces galeries qui ne présentent pourtant que peu d'intérêt sont pourtant très fréquentées. « Les jeunes possèdent même les plans, explique-t-on à  l'Inspection générale des carrières (IGC) de Versailles. Ils sont prêts à  dépenser une énergie folle pour y pénétrer, malgré les murs en béton armé qui obstruent les entrées officielles ». Le 31 octobre dernier, une soirée Halloween a été organisée dans ces cavités. Il y a quelques années, les policiers avaient dà» évacuer plus d'une centaine de personnes lors d'une rave-party.

« De véritables coupe-gorge »

Malgré les efforts des communes pour empêcher l'entrée à  ces galeries, la tradition perdure. Mais depuis une dizaine d'années, le profil de ces hommes des cavernes » a changé. « Les catacombes sont devenues de véritables coupe-gorge en moins de dix ans, explique David, un jeune homme âgé de 29 ans, qui fréquentait dans le passé certaines de ces galeries. Dans les années quatre-vingt-dix, j'y allais régulièrement le week-end avec des bandes de copains. On se rejoignait tous là -bas pour faire la fête. On mangeait, on buvait, on fumait un peu, c'était bon enfant. L'ambiance a commencé à  changer en 1994. Un soir on s'est fait virer de la grotte par des skinheads. Ils avaient dit que c'était leur territoire. On n'y a plus jamais remis les pieds. Nous nous sommes rabattus sur une autre cavité du côté de Saint-Germain-en-Laye, et une nouvelle fois on s'est fait mettre dehors. Depuis, les skins se sont fait chasser par des jeunes des cités. C'est devenu un lieu très violent. Je n'y suis plus retourné. »

La maire de Bougival, Aline Pascal, confirme que ces carrières sont des repaires pour de jeunes délinquants : « Les jeunes ont toujours bravé les interdictions, mais avant c'était des groupes venant des villes environnantes qui y faisaient la fête. Aujourd'hui, ces galeries sont squattées par des jeunes extérieurs au département. »

Isabelle Masoni